Élection présidentielle américaine 2024 : Donald Trump desserre l’étau judiciaire et financier

Dans un scénario idéal auquel Trump lui même n’aurait pas cru rêver, les appareils judiciaire et financier américains ont respectivement acté des positions favorables à l’ancien président ces dernières semaines, alors que ce dernier est visé par 91 chefs d’accusation dans 4 affaires différentes. Par un enchainement de circonstances inespéré, le candidat républicain a bénéficié de la clémence du juge de l’État de New-York, voyant son amende passer de 400 à 175 millions de dollars, et son réseau social “Truth Social“, dont il détient les deux tiers des parts, intronisé en bourse à près de 9 milliards de dollars le 26 mars dernier. De quoi préparer sereinement la fin de sa campagne, Donald Trump est crédité de plus de la moitié des intentions de vote, et esquiver la banqueroute qui le menaçait dès lors en empochant un pactole de plus de 5 milliards de dollars à la bourse. Seule ombre au tableau, l’homme d’affaires ne fait que gagner du temps. La justice finira par passer, et il le sait. Pour le candidat américain, tout le défi consiste désormais à faire repousser les échéances judiciaires au lendemain de l’élection, alors que ses comportements jugés grossiers et virulents ne sont pas de nature à améliorer les opinions des plus indécis dans le cadre du scrutin du 5 novembre prochain.

Rhétoriques incendiaires, attitudes outrancières et feuilletons judiciaires

Aux États-Unis, une image de Joe Biden ligoté publiée par Donald Trump suscite l’indignation.  L’ancien président américain Donald Trump a posté vendredi 29 mars une vidéo montrant le président Joe Biden ligoté à l’arrière d’une camionnette, relate CNN. “Cette image de Donald Trump est le genre de connerie que vous postez quand vous appelez à un bain de sang”, a fustigé samedi un porte-parole de la campagne de Joe Biden, faisant référence à de récents propos du républicain. “La vidéo est un nouvel exemple de l’utilisation par Trump d’images sombres et violentes dans ses messages de campagne, alors que son penchant pour la rhétorique incendiaire semble renforcer sa position dans la course à la présidence”, décrypte la chaîne.

Les attitudes de l’ancien président ont également été pointé par la justice américaine dans le cadre de ses prises de paroles répétées, invectivant et dénigrant les personnalités juridiques et politiques qui l’entourent. Des restrictions de parole lui ont ainsi été imposées le 26 mars dernier dans le cadre de son procès pour paiements dissimulés à une actrice de films pornographiques, quelques heures après des publications du candidat sur son réseau “Truth Social“, attaquant personnellement le magistrat et sa fille. Cette décision du juge Juan Merchan met en demeure l’ancien président de s’abstenir de commentaires publics visant « des témoins connus ou probables » au procès, les membres de l’équipe du procureur à l’exception de ce dernier, les membres de leur famille, ainsi que « tout juré ou juré putatif dans cette procédure pénale ». Un recadrage jugé particulièrement nécessaire par certains quotidiens américains, alors que les attitudes de Trump visent à polluer le débat, salir les personnes et les institutions des États-Unis, qu’il juge être “the only one“, le seul capable de redresser.

L’ancien président Donald Trump a assisté jeudi 4 avril à la veillée funèbre d’un policier de la ville de New York décédé en service, à Massapequa Park, New York. Dave Sanders / New York Times

Les chances que Donald Trump se réveille un jour et décide de ne pas aller au bout sont proches de zéro” selon Astead Herndon, journaliste au New-York Times en charge de la campagne de Trump. Sa victoire a l’élection présidentielle, a fortiori la réussite de sa campagne, est totalement liée à son combat pour rester hors de prison. Donald Trump est en effet inculpé pour 91 accusations de crime dans 4 affaires pénales devant les tribunaux d’État et fédéraux. Sur le papier, il fait face à quelque 700 ans de prison, et pourtant il représentera le parti républicain à la prochaine élection. Mais quel que soit le calendrier précis, le statut juridique de M. Trump est l’un des plus grands jokers de l’élection présidentielle de 2024. Au sujet du procès à venir pour ingérence dans l’élection en Géorgie en 2020, “à ce stade, sauf pour imprévu, Trump sera condamné dans cette affaire“. Devant le tribunal de district fédéral de Washington, dans plus de 500 affaires, seulement deux ont donné lieu à des acquittements. “Une fois qu’il y a une condamnation, il y a une peine” selon l’analyste américain. Il est donc probable que Donald Trump soit condamné à une durée de prison fédérale importante avant la tenue des élections de 2024. Mais s’il remporte l’élection, même avec une condamnation sur le dos, il tenterait de commuer sa peine en révoquant et et en ingérant dans chacune des affaires dans lesquelles il est impliqué. Tout cela est à ce stade purement hypothétique, notamment eu égard du fait que la situation est inédite car elle ne s’est jamais présenté en ces termes. En cas de victoire, le pouvoir politique et les leviers de contrôle qui seront à sa disposition pourraient, en théorie, inverser les conséquences significatives des procès qui le visaient jusqu’alors.


Le réseau social “Truth Social” sauve Trump de la banqueroute

Il avait jusqu’alors tout tenter pour esquiver la banqueroute : vendre des baskets de mauvaise facture couleur or, faire fabriquer par la Chine des tee-shirts à son effigie, placements de produits immobiliers et douteux… Trump n’aurait pu espérer bénéficier d’un traitement si favorable. Le candidat républicain à la présidentielle américaine de 2024, condamné à verser à la justice une caution de 175 millions de dollars, voit sa fortune bondir d’environ 5,5 milliards. Ce mardi 26 mars sur les écrans épileptiques de la bourse de New-York, l’ancien président acculé par les troubles judiciaires, détenteur de près des deux tiers de la société “Trump Média & Technology”, propriétaire du réseau social “Truth Social“, semble être absout par les marchés financiers. Côté sous l’acronyme “DJT” pour Donald John Trump, l’entreprise du candidat star du système semble avoir fait une entrée réussie au Nasdaq, le CAC 40 américain.

Dado Ruvic | Crédits : REUTERS

À court terme, les partenaires financiers de Trump ont adopté une tactique ingénieuse selon Arnaud Leparmentier, correspondant du journal Le Monde à New York : “Au lieu d’attribuer directement des fonds à la campagne de Trump, ils achètent des actions, espérant gagner de l’argent et sauver de la banqueroute leur champion, qui doit verser 454 millions de dollars à la justice new-yorkaise“. Lorsque la caution de Trump a été réduite par la justice à 175 millions ce lundi 25 mars, l’action DJT s’est envolée, les boursiers constatant la solvabilité de Donald Trump et ayant moins à s’inquiéter qu’il ne vende ou mette en garantie ses actions pour honorer ses dettes judiciaires. Dès lors, que tout le milieu politico-judiciaire en soit témoin : Donald Trump vient d’esquiver la banqueroute et trouver du ressort alors que toute l’intelligentsia américaine, les démocrates en tête, le croyait acculé. Grâce à de puissants leviers dans le monde financier, pressé de voir Trump regagner la Maison Blanche, l’ancien président et homme d’affaires s’offre un coup fabuleux à 8 mois du scrutin, en renforçant son arsenal juridique et économique pour partir à l’assaut de l’appareil électoral américain, et ainsi faire oublier des juges et des citoyens ses postures outrancières et grossières.


Crédits : Arnaud Leparmentier (Le Monde), Astead Herndon (New York Times), CNN, France Info

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Rédacteur de contenus pour l'Équinoxe Journal

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